[Reproduit partiellement et adapté de l’article français Wikipedia]
Presentation de l’artefact
La « pile électrique de Bagdad » est le surnom donné à une poterie datant du IIIème siècle avant Jésus-Chist, découverte en 1936 dans un village près de Bagdad dans l’actuelle Irak.
Dans les années 1930, l’archéologue autrichien Wilhelm König découvrit dans les sous-sols du musée archéologique de Bagdad une poterie de 15 centimètres de haut et d’un diamètre d’environ 7,5 centimètres. König pensait que cette poterie datait de l’époque de l’Empire parthe (247 avant Jésus-Christ – 224 après Jésus-Christ). Cependant, selon le docteur St. John Simpson du département du Proche-Orient Ancien du British Museum, le vase daterait plutôt de l’ère des Sassanides (224–651 après Jésus-Christ). Quelques-unes furent découvertes dans les ruines de Khujut Rabua près de Bagdad et dix autres à Ctésiphon.
Ce dispositif est fermé d’un bouchon en bitume qui rend malcommode l’accès au contenu. Sous le bouchon est disposée une tige de fer entourée d’un cylindre de cuivre qui sont isolés à la base par un tampon de bitume. Le cylindre est soudé au fond par un alliage de plomb et d’étain.
Les hypotheses
Cette poterie est renommée depuis que quelques archéologues, tels que Wilhelm König aient émis l’hypothèse qu’elle aurait pu servir de pile électrique. Cette thèse est toujours controversée en 2019, la théorie la plus vraisemblable et la mieux acceptée étant qu’il s’agirait de vases conçus pour entreposer ou transporter des papyrus, le fait qu’il ne manquât presque rien pour obtenir une pile fonctionnelle n’étant alors qu’une coïncidence.
Pour ce qui est de l’hypothèse d’une pile électrique, le disparition de ces artefacts pose problème puisqu’il n’est plus possible aujourd’hui de faire les analyses chimiques, alors que techniquement réalisables, comme par exemple pour les morceaux de céramique du site de Stonehenge (regardez l’émission « Dans le secret de Stonehenge » pour en savoir plus).
L’archéologie expérimentale permet de construire une copie de cet artefact aujourd’hui, à laquelle on doit ajouter les éléments manquants pour que cette « pile » antique fonctionne : des fils pour la brancher et de l’acide pour la réaction. Une telle pile peut fonctionner avec du jus de fruit à la place de l’acide (le jus de fruit contenant généralement de l’acide) ou de l’eau salée. Suivant les tests effectués sur des reconstitutions, les chercheurs ont obtenu des tensions électriques très faibles allant de 0,5 à 1 volt. Pour l’intensité du courant qu’une telle pile pourrait produire, ils semblent qu’ils soient très faibles, une expérience ayant donné par exemple seulement 24 µA lorsque branchée à une résistance de 1 000 Ω.
Le debunk
En juillet 2017, une étude très complète publiée par Christine Blondel, Bertrand Wolff et Marie-Hélène Wronecki, trois chercheurs du CNRS permet de prouver que l’hypothèse d’une pile électrique est cependant très hautement improbable. Et encore plus improbable est l’hypothèse d’une utilisation pour une technique de galvanoplastie.
Nous invitons le lecteur à lire ces résultats car les arguments avancés sont très bien construits. Et les trois chercheurs de souligner que :
« Cela n’empêche pas l’interprétation « électrique » d’être aujourd’hui très populaire, il n’est que de surfer sur Internet pour s’en rendre compte. En 2005, MythBuster (littéralement « casseur de mythes »), une émission phare de Discovery Channel animée par deux spécialistes des effets spéciaux, reproduit l’expérience de dorure sous les yeux des téléspectateurs et en déduit que l’hypothèse de la pile de Bagdad est « plausible ».
Par une aventureuse association d’idées, le rapprochement est parfois fait avec un bas-relief du temple de Denderah en Haute-Egypte, sur lequel certains n’hésitent pas à voir une préfiguration d’ampoules électriques ou de tubes à décharge. […] »
Notons que le rapprochement « aventureux » avec la Lampe de Dendérah a déjà été fait dans une émission en 2005 : ce n’est donc pas une nouvelle idée.
Cette étude rappelle que des archéologues ont montré qu’il existait déjà des techniques d’orfèvrerie de plaquage de feuille d’or 2000 ans auparavant et que la dorure au mercure était également connue : il n’y avait donc aucune utilité à cette époque-là en Perse de connaître une méthode par galvanoplastie, l’électrolyse nécessitant une solution de sel d’or qu’il était impossible de produire alors. Une seule personne affirme avoir réalisé cet exploit qui va à l’encontre de la théorie de l’électrolyse, Arne Eggebrecht, un égyptologue allemand qui n’a jamais publié ses résultats et qui n’est pas physicien par ailleurs.
Notre conclusion sera donc celle de cette étude :
« Pour ce qui est de la possibilité de dorer des objets en utilisant la « pile de Bagdad », on peut être plus affirmatif : même si la poterie avait été constituée en pile elle n’a pas pu servir à pratiquer des dorures par électrolyse car les sels d’or en solution ont été obtenus seulement au Moyen-Age, par les alchimistes arabes. »